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Azincourt 1415 : La capitainerie de chats des anglais massacre la chevalerie française ? Que nenni !

12/09/2014
Azincourt 1415 : La capitainerie de chats des anglais massacre la chevalerie française ? Que nenni !

Les chats d’Azincourt, c’est d’abord une histoire romancée par un romancier. Un plumitif de talent, André Malraux, auprès d’une autre légende, De Gaulle. 

Dans les belles et bonnes légendes, ce que j’aime, ce ne sont pas les grands faits d’armes en général sur-racontés par les épigones officiels, mais les contextes, les détails, les circonstances qui éclairent tellement mieux un moment qui a pu être une clé de la grande histoire. 

Entre Malraux et De Gaulle, que l’on soit dans l’histoire ou dans l’hagiographie, c’est du lourd ! 

Ce jour-là, celui de notre histoire, celle des chats d’Azincourt, Malraux est donc dans le bureau de De Gaulle, à la Boisserie, la retraite du général à Colombey-les-Deux-Eglises après sa déconfiture de 1969. On parle d’histoire bien entendu, et Malraux affirme à De Gaulle qu’à l’époque de la guerre de cent ans, l’Europe était parcourue d’immenses bandes de rats. Comme l’animal est destructeur, en particulier des vivres absolument nécessaires au ravitaillement des armées, les anglais ont donc avec eux, en campagne, des capitaineries de chats et sont donc protégés des ravages de la peste et du « cholé-rats ».  (Lecteur, j’espère que tu me pardonneras ce jeu de mots indigne d’un Malraux…) 

Réflexion de Tante Yvonne, qui  n‘en rate jamais une… « Déjà que c’est impossible de faire cohabiter deux chats, alors par rangées de cent ! ». Chère tante Yvonne, déjà auteure d’une autre phrase historique… Après l’attentat du Petit Clamart, énorme pub d’ailleurs pour la DS Citroën, le chauffeur de De Gaulle ayant roulé à plus de 140 km/h sur ses pneus lacérés par les balles de l’OAS pour s’extirper des lieux où ça tirait dans tous les sens. « Les poulets n’ont rien »  aurait dit Yvonne De Gaulle, n’évoquant évidemment pas les gendarmes de l’escorte ! Même proche de la mort, la première dame ne s’exprimait pas de la sorte, mais elle parlait des poulets achetés au marché avant de quitter Paris, destinés à la table du général et soigneusement empaquetés à l’arrière de la DS présidentielle.  Preuve que chez les De Gaulle, quelles que soient les circonstances, on se préoccupait des animaux, même prêts à rôtir… 

Retour à la Boisserie et la visite de Malraux. Gros soupir de De Gaulle à cette évocation de capitaineries de chats, et de la France qui est finalement toujours en retard d’une guerre ou en tous cas des moyens modernes de la guerre, en 1415 c’était l’arc, en 1939 le char. 

Avant la deuxième guerre mondiale, l’Etat Major français  n’a pas cru aux divisions blindées préconisées par De Gaulle, qui a remporté d’ailleurs à Montcornet, avec ses chars, une des seules victoires françaises lors de la désastreuse campagne de 1940. 

Campagne de France qui a vu les Panzer divisions de Guderian passer à travers les lignes françaises comme le couteau dans le beurre… 

Donc selon Malraux, ce 25 octobre 1415, à Azincourt, les rats se sont jetés sur le suif utilisé par les arbalétriers génois et mercenaires du Roi de France  pour graisser les cordes de leurs armes, les empêchant ainsi de tirer leurs carreaux meurtriers  sur l’Anglois… 

Et pendant ce temps, les 5000 archers gallois en face, commencent le massacre de la chevalerie française, plus de dix mille morts côté français, à peine six cent côté anglais, une dérouillée mémorable… 

De Gaulle a souri d’imaginer des chats par rangs de cent dans les troupes d’Henri V, roi d’Angleterre, qui se prétendait aussi roi de France, et qui pour le prouver, avait ravagé une partie de la Normandie avant de rembarquer à Calais. C’est sur le chemin du retour vers ce port que les 25 000 hommes du roi de France attendaient les 6000 anglais promis au massacre… 

Bon, maintenant la réalité… 

Ce jour là, à Azincourt, il pleut des hallebardes. La chevalerie française attaque bille en tête, persuadée que cette poignée de pouilleux d’angliches ne va pas tenir dix secondes sous ses coups. Du coup, elle ne laisse pas les arbalétriers génois faire leur boulot « de préparation », d’ailleurs rendu difficile parce que  les cordes de leurs armes sont difficiles à tendre à cause de la pluie, la tension d’une arbalète est tellement importante qu’elle ne peut pas être faite à la main, mais à l’aide d’une sorte de manivelle. Et la pluie rend l’opération difficile. 

Cala dit, et on le sait depuis Crécy, une autre branlée prise en 1346, soixante neuf ans plus tôt… Un archer (gallois) tire six flèches à la minute quand un arbalétrier (génois) balance un seul carreau. Par ailleurs, chaque archer gallois est protégé des attaques de cavalerie par un épieu planté devant- lui. Ce qui prouve donc qu’au sein des armées de France, on évolue vraiment en retard et l’on n’apprend rien d’une défaite… 

Retour à Azincourt… Non seulement les chevaliers sont décimés par les tirs des archers d’en face, mais en plus, leur attaque théoriquement terrifiante s’enlise dans la boue. Là, les Anglais lâchent leurs 1000 fantassins qui égorgent à qui mieux-mieux les chevaliers à terre et ne pouvant se relever à cause de leur armure de plusieurs dizaines de kilos, scotchés dans la boue… 10 000 morts ! 

Bon mais les chats ? Rien ne confirme leur présence à Azincourt, Malraux a peut-être un peu romancé le truc… Romancer, ça il savait faire. De Gaulle ne l’a peut-être pas cru, l’histoire ne fera pas florès, à ce moment, ni l’un ni l’autre ne font plus partie de l’histoire de France… En revanche, mais c’eût été moins grandiose, les deux personnages auraient simplement pu parler de leurs chats ! 

Car De Gaulle avait un chat, Ringo de Balmalon, un chartreux qu’il  appelait « gris-gris ».

Malraux aussi a eu des chattes,  respectivement nommées Lustrée et Fourrure. 

Ce qui est moins historique qu’Azincourt, moins meurtrier aussi. Plus tendre aussi. Je constate d’ailleurs au passage que ces deux très grands écrivains, la langue française de De Gaulle est une merveille, et personne ne peut nier cette qualité à Malraux, bref ces deux colosses de l’écriture ont donné à leurs chats des noms d’une banalité consternante. Comme quoi, même une grande plume reste coite face à un greffier. Comme vous, comme moi… trop forts les chats…  

 

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