Décidément, la manif, depuis quelque temps, cela devient très haut de gamme ! Ces protestations, à l’origine populaires, de malheureux qui crèvent la dalle sont devenues le rendez vous de la haute ! Les centres équestres ont défilé contre la hausse de la TVA, ils ont d’ailleurs eu raison, leur taxe va augmenter moins que prévu, voici maintenant les éleveurs de chatons dans la rue, pour la même raison. Et oui, le Bombay, l’Angora, le Sphynx, le Maine Coon vont augmenter de 13%, intolérable !
Les centres équestres ont eu des compensations parce que c’est une pratique sportive, qui coûte un bras, mais c’est du sport. L’élevage de chats de race, c’est du luxe, même si cela revient très cher quand on fait les choses dans les normes, et même si les élevages sont souvent d’un glauque absolu, sans parler de l’odeur…
Et la TVA y passe de 7 à 20%.
Et les éleveurs de descendre dans la rue en hurlant que cette taxe qui augmente va les tuer, en particulier parce que cela va favoriser l’élevage clandestin, les ventes en direct des particuliers et les élevages intensifs, qui font saillir les malheureuses femelles sans arrêt, pour qu’elles pondent le plus possible de portées à 1000 balles le chaton… Quitte d’ailleurs à ce que les chatons soient parfois un peu difformes, mais s’il y en a un qui est invendable, les autres valent de l’or…
Mais de quoi parle t’on ? Si la TVA passait de 7 à 20% sur des produits de première nécessité, ce serait énorme j’en conviens, mais ce n’est pas le cas ici, depuis 1789, on ne touche plus aux boulangeries ou au prix du pain, il y en a qui se sont retrouvés sur la bascule à charlot pour moins que ça ! On en revient aux chatons de luxe.
Un chat à 1000 euro, ça ne s’achète pas par nécessité mais par envie. Un chaton de race à 1000 euro va donc coûter 130 euro de plus. Et on va me faire croire que quelqu’un décidé à s’offrir un chaton à 1000 € va plutôt acheter un frigo parce que le chaton en question a augmenté de 130 balles ! Faut savoir… Mon métier m’a permis de piloter les plus belles autos au monde et pourtant, je me suis beaucoup plus éclaté à moto dans les Gorges de l’Ardèche qu’à passer mon temps à craindre de voir rayer les belles carrosseries par un vélo ou un caillou, donc fondamentalement, je préfère le grand frisson au luxe. Et donc chat de race ou pas, ce que je veux, c’est un complice…pas un tas d’or… Mais je conçois que d’autres voient la vie uniquement dans les draps de soie…
Le gros bruit à l’arrière de la Porsche, le feulement rauque du Ferrari, la qualité de cuir incroyable de l’Aston Martin, il y en a qui ne peuvent vivre qu’avec ça et qui en plus en ont les moyens. C’est parfaitement respectable. Moi je me fous que les gens soient riches ou pas, mais quand ils le sont, j’aime qu’ils claquent leur pognon par passion. On le sait, ça fait marcher le commerce. Et ça crée des emplois. Car le luxe, ça coûte et ça rapporte. Enfin en théorie. Le problème des éleveurs de chat de race, c’est que ça ne rapporte pas forcément.
Etonnant ? On a fait le calcul à Micetto, l’un d’entre nous a voulu un moment se lancer dans l’élevage de Bombay, c’est qu’en effet, pour des chats vendus aux alentours de 1000 €, les premières portées vont coûter une blinde. Parce que pour être éleveur, il faut avoir le CETAC, un diplôme, il faut avoir une femelle, il faut payer la saillie (un chaton), après il faut passer chez le veto, et là on sait que ça coûte plus cher que d’aller chez le cardiologue, entre les vaccins de la mère, la vérification de santé, l’alimentation, puis les frais sur les chatons, vaccins, puce, vermifuge, les inscriptions au LOOF, on arrive, pouur une première portée de 5 chatons à prix de revient de plus de 800 €. Voir à ce sujet notre étude. Autrement dit la première portée rapporte queue dalle. Sur les suivantes en revanche il y a du gras à faire, comme disait Sylvain Floirat, sauf qu’une chatte ne fait pas une portée par jour ! Bref, les éleveurs ne sont à priori ni des voleurs ni des gros pleins de soupe. Il y a quand même des emplâtrés, dans ma vie, j’y ai même eu droit…
J’ai en effet connu ça, l’éleveur marron, avec mon magnifique, mon merveilleux Labrador « Brecht », acheté une fortune, ce clebs était d’une beauté totale et est devenu un formidable piège à nanas qui venaient me demander, lors des promenades dans le Parc de Saint Cloud, de faire saillir leur chienne par mon si beau spécimen. Hélas, le spécimen en question n’avait plus de pedigree parce que vendu par un salaud. Pas grave, j’ai aimé ce chien et je ne l’ai pas acheté pour faire de l’argent mais se dire que j’aurais pu en même temps ramasser de l’oseille et courir le (beau !) monde c’est dommage !
On revient aux éleveurs. Comme un chaton de race vaut de l’or, les particuliers qui ont une chatte de race la font saillir par un mâle non castré via les petites annonces, et d’autre part, les éleveurs prêts à tout, ils ne le sont pas tous mais il y en a, font du chaton façon usine… Avec des malformations dans tous les sens. C’était comme ça avant la TVA à 20% et ça reste comme ça… Et si cela ne se fait pas en France cela se fait ailleurs en Europe et on trouvera des gens qui deviendront « éleveurs miracle » par ce biais. Les vrais problèmes sont là, la TVA à 20% ne va rien arranger mais avec ou sans, il faut beaucoup aimer les animaux avant d’en faire un métier très compliqué et qui ne rend pas millionnaire…
Bon, on rappelle que les particuliers ne peuvent pas vendre plus d’une saillie par an, et que pour éviter les éleveurs-escrocs, il faut prendre les précautions d’usage, sur leur diplôme entre autres.
Bon, manifester dans la rue, pourquoi pas, tous ces gens n’en ont guère eu l’occasion pendant leur vie et défiler, c’est une expérience comme une autre. Même, des fois, ça marche. C’est rare, en général, face aux manifs, on envoie plus de CRS que de conseillers prêts à l’écoute… C’est sûr qu’aller faire comprendre à un chef de cabinet, aux finances de surcroît, donc sorti de la botte de l’ENA, les pires, ceux qui entre leurs années de folie avant et pendant le concours puis leur boulot de con à 18 heures par jour mais qui du coup n’ont pas vu un centimètre carré de la vie réelle pendant plus de dix ans, faire comprendre à ces mecs-là, modifiés Europe en plus, que l’on vend des lingots d’or mais qu’on gagne pas bézef, même en leur tapant vraiment sur la tête, c’est pas gagné ! Mais bon, on a réussi à sauver le camembert au lait cru contre l’Europe entière et ses très obséquieux serviteurs énarques, on va bien réussir à sauvegarder les talons rouges de la gent féline !